La nouvelle génération de pompiers n’éteindra plus de feux

Jun 8, 2017 | Urgence

Comme le titre le dit: la nouvelle génération de pompiers n’éteindra plus de feux

En fait, ce sera davantage l’exception que la règle.

Pourquoi? Pour deux raisons : l’une est financière et l’autre est opérationnelle.

La raison financière commence déjà à frapper plusieurs régions du Québec.

Combien coûte une intervention fondée pour un incendie de bâtiment?

  • Le salaire des pompiers et officiers;
  • l’essence et le diesel consommés;
  • l’usure des véhicules utilisés;
  • le coût de remplacement des équipements périssables;
  • le coût de remplacement des équipements brisés;
  • le coût des municipalités venues aider, en entraide, les pompiers de la municipalité.

Pourtant, cette liste est incomplète. En fait, les vrais coûts n’ont même pas encore été abordés.

Combien coûte réellement un incendie de bâtiment pour une municipalité? Les directions générales qui commencent à gratter le dossier ajouteront aussi les frais suivants à la liste précédente :

  • la pondération des frais de formation et du maintien des compétences des pompiers et officiers en lien avec la nature de l’intervention;
  • les coûts relatifs à l’utilisation des équipements et véhicules pendant la formation et le maintien des compétences des pompiers;
  • les coûts d’entretien des véhicules, des échelles portatives, des équipements sur les véhicules, des équipements en caserne et des équipements de protection individuelle des intervenants du service;
  • les frais reliés au fonctionnement et à l’entretien de la caserne de la municipalité;
  • la perte de revenus fonciers en lien avec le terrain sur lequel se trouve la caserne;
  • le coût de traitement de l’eau utilisée par les pompiers pour combattre l’incendie (car ça coûte beaucoup d’argent traiter l’eau de la municipalité!);
  • le coût de décontamination et de nettoyage des habits de combat et des équipements utilisés au feu;
  • le coût de traitement des formulaires et rapports en lien avec l’intervention;
  • le coût de traitement des payes des intervenants du service et des factures provenant des municipalités venues en entraide pendant l’intervention;
  • la perte en richesse foncière uniformisée, en revenus de taxation et en pouvoir d’achat par les citoyens de la municipalité surtout s’il s’agit d’un commerce ou industrie.

Lorsqu’on considère l’ensemble des coûts d’un incendie de bâtiment, ça devient très dispendieux pour une municipalité à assumer le tout. Le pire, c’est qu’après avoir payé l’ensemble de ces frais… les compagnies d’assurances des citoyens condamneront souvent le bâtiment à titre de perte totale… et ce même après avoir pris tous ces risques pour les intervenants pendant l’intervention… et avoir assumé tous ces coûts en lien avec le service de sécurité incendie pour la municipalité.

Du côté opérationnel, ai-je besoin de vous rappeler que le Underwriter Laboratories mentionnait, en 2016, qu’un bâtiment construit selon les normes en vigueur aujourd’hui prendra cinq minutes avant d’atteindre l’embrasement généralisé comparativement à 29 minutes 30 ans plus tôt?

Qui a les moyens de construire des casernes aux 8 km et les peupler d’intervenants prêts à intervenir dans un lapse de temps aussi rapide? Qui a le territoire suffisamment petit pour le permettre? En fait, qui a tout simplement le budget pour le faire? Poser la question est y répondre.

Voilà pourquoi certaines municipalités commencent à sérieusement considérer la mise en place d’une réelle brigade de prévention des incendies qui fera en sorte de prévenir les risques d’incendie par l’inspection des bâtiments selon une périodicité beaucoup plus agressive que par le passé. De plus, ces brigades sauvegarderont des vies par la mise en place d’un programme d’éducation du public adapté aux particularités des citoyens du territoire et ce, afin de favoriser l’adoption de comportements visant à prévenir les incendies et afin de préparer l’évacuation rapide des résidences en cas d’incendie.

Comme le dit le dicton : « Mieux vaut prévenir que guérir. »

Par conséquent, sachant qu’aucune vie ne sera en danger puisque les citoyens auront rapidement évacué leurs résidences, le travail des pompiers ne se résumera qu’à prévenir la propagation aux bâtiments adjacents et à prendre en charge les victimes de l’incendie. Pourquoi prendre des risques inutiles?

Ce n’est pas une vision très sexy du métier de pompier, j’en conviens. Je suis même certain que plusieurs lecteurs de cet article ne seront pas d’accord avec mon point de vue.

Pourtant, du point de vue financier et opérationnel, il s’agit d’un gain en efficience pour les municipalités…surtout pour des ressources qu’on n’a plus… le tout en conformité avec l’ensemble des lois et règlements en vigueur au Québec.

Sommes-nous en train de vivre le retour du balancier… des opérations à la prévention?

L’avenir nous le dira.

Patrick Lalonde

Patrick Lalonde

Author

Diplômé en gestion à HEC Montréal et en Leadership public à la Kennedy School de l’Université Harvard, Patrick Lalonde a occupé plusieurs emplois à titre de gestionnaire dans les secteurs privé et public avant de démarrer la firme ICARIUM Groupe Conseil. Non seulement enseigne-t-il la gestion à HEC Montréal aux étudiants du baccalauréat et du MBA depuis plus de 20 ans, tant en français qu’en anglais, mais il collabore depuis 2004 avec une multitude d’organisations à développer le plein potentiel en gestion de leurs dirigeants par le biais de formations, de coaching et de services-conseils.