Patron ou leader inspirant?

Oct 11, 2022 | Gestion

J’aime bien faire une expérience avec mes étudiants des HEC à chaque début de session. Je leur demande de me définir ce qu’est le leadership et je m’assois en silence pour les écouter. Il s’ensuit invariablement un silence… parfois lourd… parfois très long (j’ai déjà compté 15 minutes!) où chacun attend que je leur donne une réponse à la question existentielle posée. Au bout de plusieurs minutes, il finit toujours par y avoir un étudiant qui rompt le silence pour donner une tentative de réponse. Puis, un second. Puis, un troisième. On se relance… puis on me regarde du coin de l’œil en signe d’approbation. Je ne bronche pas. J’attends les bras croisés en silence. Vient ensuite le moment où un étudiant, las d’entendre les réponses de ses collègues et de me voir assis en silence, m’adressera un reproche pour me dire que je ne fais pas mon travail et que c’est à moi à répondre à la question parce que c’est moi l’enseignant. Il ajoutera parfois qu’il a l’impression de perdre son temps.  

C’est de cette façon que j’aime introduire le concept d’autorité à mes étudiants.

On me confère un certain niveau d’autorité formelle dans mon poste en me nommant à titre d’enseignant. Pour faire un lien avec vous qui lisez cet article, cette autorité vous est notamment conférée dans votre emploi actuel par votre positionnement dans l’organigramme, le titre du poste que vous occupez et possiblement l’acronyme après votre signature. Une façon de vous donner une certaine crédibilité au sein de votre organisation municipale, de votre service et/ou de votre équipe de travail.

Avec cette autorité vient un contrat implicite : celui de donner une direction claire à suivre à vos troupes, à fournir une protection à ceux qui suivront le chemin que vous leur tracerez et à assumer votre obligation de maintenir l’ordre au sein de votre équipe.

En me positionnant en silence devant la classe, est-ce que je remplissais ma part du contrat face à des étudiants en quête de savoir… qui me faisaient confiance… qui croyaient bêtement que je remplirais ma part du contrat implicite? Non.

Et vous… le faites-vous dans votre rôle actuel?

Je leur demande alors de réfléchir à ma seconde question : Qu’est-ce qui fait qu’ils vont VRAIMENT écouter ce que l’enseignant devant la classe va leur dire et participer activement aux activités en classe plutôt que de lire leurs courriels, gribouiller des dessins dans leur cahier de notes, fureter leur profil Facebook ou tout simplement cogner des clous?

C’est là qu’entre le concept d’autorité informelle. Un individu gagne en autorité informelle par sa tenue vestimentaire, sa présence physique, son ton de voix entraînant, sa façon de s’adresser respectueusement aux autres, la passion qu’il démontre pour le sujet traité, son niveau d’expertise face aux concepts abordés, sa créativité, etc. En d’autres mots, un patron gagne ou perd instantanément de l’autorité informelle au sein de son équipe en fonction de sa capacité à démontrer ou non certaines caractéristiques qualitatives de sa personne en des moments clés.

Saisissez-vous vous toujours le moment pour accroitre votre autorité informelle avec les membres de votre équipe?

Finalement, je pose une dernière question à mes étudiants : De qui ont-ils appris davantage jusqu’à présent? Des enseignants qui se fiaient uniquement sur leur autorité formelle ou de ceux qui assumaient une formidable autorité informelle avec l’ensemble du groupe? Poser la question est y répondre.

J’utilise normalement ce moment pour leur expliquer que le leadership assumé par un gestionnaire n’a que très peu à voir avec son niveau d’autorité formelle attribué par ses patrons (par exemple, son grade), mais bien davantage avec le niveau d’autorité informelle accordé par les membres de son équipe de travail.

Patrick Lalonde

Patrick Lalonde

Author

Diplômé en gestion à HEC Montréal et en Leadership public à la Kennedy School de l’Université Harvard, Patrick Lalonde a occupé plusieurs emplois à titre de gestionnaire dans les secteurs privé et public avant de démarrer la firme ICARIUM Groupe Conseil. Non seulement enseigne-t-il la gestion à HEC Montréal aux étudiants du baccalauréat et du MBA depuis plus de 20 ans, tant en français qu’en anglais, mais il collabore depuis 2004 avec une multitude d’organisations à développer le plein potentiel en gestion de leurs dirigeants par le biais de formations, de coaching et de services-conseils.